Amadou Dicko : « Le tennis malien a un soutien de taille »

Le Secrétaire général de la Fédération malienne de Tennis et ancien directeur exécutif de la zone 2 de tennis d’Afrique de l’ouest entre 2011 et 2017, Amadou Dicko, estime que le tennis malien se porte bien, tout en rappelant que les athlètes maliens sont allés remporter la médaille d’or à Lomé (Togo), au mois d’avril dernier lors du championnat d’Afrique de l’ouest et d’Afrique centrale de 12 ans et moins. Il a également fait savoir que le tennis malien a un soutien de taille.

Entretien.

Comment se porte le tennis malien aujourd’hui ?

Le tennis malien se porte bien dans la mesure où ces derniers mois, le tennis malien a fait parler de lui dans l’espace ouest-africain parce que les athlètes maliens sont allés remporter la médaille d’or à Lomé au mois d’avril dernier lors du championnat d’Afrique de l’ouest et d’Afrique centrale de 12 ans et moins. Suite à ce titre le Mali représentera l’Afrique de l’ouest et l’Afrique centrale à la phase finale du championnat d’Afrique de 12 ans, qui doit se dérouler en Tunisie en principe au mois d’octobre prochain. Le tennis malien se porte bien dans la mesure où le Mali a réussi à se faire bien entendre dans le gotha du tennis ouest-africain, en ce sens que nous participons à la plupart des compétitions organisées par la Confédération africaine de tennis soutenu par la Fédération internationale de tennis au plan sous-régional.

Aujourd’hui le tennis se joue dans toutes les régions administratives du Mali, c’est extrêmement important sachant que c’était une discipline reconnue, avec le programme de développement que nous avons mis en place ces dernières années que nous actualisons à chaque fois. Nous avons mis l’accent sur le développement du tennis à la base en introduisant le tennis dans les régions. Les régions rivalisent aujourd’hui avec la capitale Bamako et s’imposent au sein des différentes catégories et c’est très important. Nous avons des joueurs maliens qui ont marqué le tennis ouest-africain tel que Seydou Diallo, qui avait été retenu parmi les grands joueurs d’Afrique de l’ouest au centre de haute performance de Casablanca au Maroc. Il avait aussi séjourné au centre international de Dakar. Yacouba Maïga qui a aussi fait un séjour à Dakar au centre d’haute performance, a également fait les beaux jours du tennis malien. Quand on part au niveau international, le Mali a abrité plusieurs tournois « Prize money » de tennis et a réussi à s’imposer aux dernières éditions.

C’était quand les dernières éditions du tournoi « Prize money » de tennis ?

La dernière du prize était en 2017 à Bamako, depuis lors le tournoi n’a pas eu lieu, c’est vraiment une compétition qui permet aux joueurs africains d’avoir beaucoup de ressources financières et des compétitions dans les pieds, pour les permettre d’aborder les joutes internationales et c’est extrêmement important. Le tennis se porte bien dans la mesure où nous avons réussi à développer les programmes de l’AITF notamment les inter-centres, nous organisons régulièrement ces compétitions de jeunes (U12, U14, U16) qui constituent la graine du tennis national et ouest africain, la base est élargie. Le tennis se porte bien dans la mesure où les entraîneurs que nous avons formés sur la base de l’initiation, du suivi et la gestion du sport d’élite et je pense que c’est une très bonne chose pour le tennis malien ainsi que pour le tennis ouest-africain. Nous avons une Fédération de tennis malienne qui se bat avec les moyens avec nos partenaires nationaux, l’état du Mali fait ce qu’il peut de façon globale. Tous les pays souffrent de la crise mondiale, le ministère des Sports du Mali aussi se bat, fait ce qu’il peut mais avec nos partenaires, on parvient à mobiliser des ressources et organiser des compétitions ou faire participer nos joueurs aux compétitions sous-régionales, c’est extrêmement important. De façon globale je peux dire que le tennis se porte bien au Mali.

Quels sont les valeurs sûres du tennis malien ?

Pour moi, la valeur sûre passe par la stratégie que nous avons mis en place pour permettre d’atteindre les résultats sportifs escomptés, parce qu’on ne peut pas avoir de valeurs sûres sur le plan individuel, si on n’a pas posé un certain nombre de disposition qui puisse permettre de conduire le processus qui nous amènera à travailler sur l’élite, c’est ça le plan de développement. Nous avons déjà élaboré une certaine série de plan de développement et depuis les 20 dernières années. Il y a un 5ème plan de développement qui est en cours d’élaboration sur lesquels nous avons mis l’accent sur le sport d’élite. Le sport d’élite est basé sur les jeunes, les -18, -16, -14, -12, qui sont actuellement en forme. Nous avons remporté le trophée, la médaille d’or à Lomé, le 18 avril dernier au championnat d’Afrique de l’ouest de la catégorie des 12 ans et qui vont représenter l’Afrique de l’ouest, l’Afrique centrale et le Mali, bien sûr à la phase finale de cette catégorie en Tunisie au mois d’octobre prochain.

Aujourd’hui le tennis féminin paye si on fait un suivi des jeunes. Le tennis à l’école, la base est certaine, il suffit d’un bon suivi, d’un bon programme pour pouvoir faire la détection. Nous en avons détecté et aujourd’hui la relève est assurée au Mali après les Seydou Diallo, Yacouba Maïga, après aussi leurs aînés tel que Sékou Dramé qui fut plus tard entraîneur de niveau 2 de tennis qui a encadré ici les jeunes du centre national de tennis du Mali, qui font la fierté et parmi ces élites féminines, nous avons Aïchata Keïta qui a été parmi les 10 meilleures joueuse d’Afrique de la catégorie des 14 ans il y’a quelques années de cela. Elle a même participé au Master en Égypte en 2014, je pense que ça se sont des valeurs sûres. Nous travaillons dans le sens aussi de voir si on peut aller aux JO de Paris 2024. Ce n’est pas facile, mais nous avons une vision si on ne parvient pas à atteindre Paris 2024, les prochain JO 2028, seront dans notre ligne de mire. Nous travaillons aussi sur l’encadrement, les entraîneurs pour qu’il soit de qualité afin d’assurer un certain nombre de choses.

Comment allez-vous faire pour avoir ces valeurs sûres qui vont hisser haut le drapeau malien au niveau du tennis mondial ?

Pour avoir ces valeurs sûres, la Fédération malienne de tennis, s’est appuyée sur le ministère des Sports, qui, à travers le lycée Sportif Ben Oumar Sy, a réussi à introduire le tennis dans la pédagogie au niveau de ce lycée sportif et se sont les jeunes qui lient l’école et le sport. Cette année nous avons au moins 4 filles qui ont passé le Bac ont été admises à l’université. C’est encourageant étant donné qu’elles sont parmi l’élite du tennis national dans les différentes catégories de jeunes, ça c’est des valeurs sûres sur lesquelles le Mali, l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique peuvent compter. Les valeurs sûres ne sont pas uniquement que les athlètes, l’encadrement et management,  les valeurs sûres c’est aussi les partenaires, le financement, quand on a des partenaires sérieux (…). Je pense que c’est aussi une valeur sûre, sur laquelle on peut compter parce que sans moyens il n’y a pas de résultat. Je pense que c’est le lieu de saluer ce partenariat entre la Fédération malienne de tennis et le Comité national olympique et sportif qui est notre garant et aussi le partenariat que nous avons noué avec Moov Africa Malitel. Donc, je profite de votre plate-forme pour que l’Afrique toute entière, le monde entier puisse savoir que le tennis malien à un soutien de taille, qui l’aide à continuer en vue d’atteindre nos objectifs.

Quelles sont les difficultés rencontrées par la Fédération ?

Comme toute Fédération, il y a forcément des difficultés. Nous avons des difficultés au niveau des ressources financières et matérielles, qu’il faut mobiliser pour que l’activité se fasse correctement, pour que les joueurs soient dans ces conditions de jeu, d’entraînement, de préparation, de participation aux compétitions. Ces ressources se situent à 3 niveaux. C’est d’abord l’État, ensuite le ministère des Sports et enfin la Fédération. Les conditions sont difficiles aujourd’hui partout dans le monde, ainsi que le monde du sport. Le département des sports ne restant pas en marge, a assez de difficultés pour les disciplines sportives. Le football et le basket-ball bouffent 80% du budget du ministère des sports, ça se comprend se sont les sports rois, mais on se bat avec. Ce qu’on nous donne et aussi la mobilisation des financements de sponsors, de partenaires, c’est timide…

En Afrique, il est difficile de mobiliser des sponsors, au Mali c’est aussi le cas. Mais, on fait avec ce qu’on a donc il faut imaginer. Il faut chercher quand on cherche. On fait avec ce qu’on a, c’est un peu ces aspects. L’autre aspect aussi, ce sont les matériels, ils sont chers. C’est aussi surtout la Fédération internationale qui accorde du matériel. Ces matériels ne suffisent pas, c’est juste pour animer les centres Juniors Tennis Initiative et on fait avec. Ce n’est pas facile d’avoir assez du matériel, donc c’est un peu ceux à quoi nous sommes confrontés comme difficultés. Il faut aussi former l’administration du sport, ceux qui managent le sport, la Fédération, l’encadrement technique, les arbitres, je dirai qu’il faut beaucoup de formation, des renforcements de capacités pour que chacun puisse jouer son rôle, afin d’atteindre les résultats escomptés. Sur le plan suivi des talents, le plan suivi du développement du tennis de notre pays.

Je pense que ce sont ces difficultés qui sont presque similaires à tous les pays, donc il faut se battre. L’imagination de ceux qui dirigent la Fédération, leur dynamisme, leur compétence ont fait la différence. Je pense que nous au niveau du tennis malien, la Fédération malienne on se bat, nous travaillons sur la base de notre plan de développement. Ce plan de développement cherche, planifie, organise et je pense qu’on a des résultats même si les moyens ne suffisent pas.

Êtes-vous en contact avec des athlètes expatriés ?

Comme athlètes expatriés nous en avons, aujourd’hui Seydou Diallo qui est parti en Turquie, fait la fierté du Mali sur le plan international là-bas. Yacouba Maïga qui était en Chine, il a récemment quitté le Mali qui se propose d’aller aux USA. Je pense que ce sont des valeurs sûres. Il y a Tamba Samassa bien qu’il ait pris de l’âge aux USA ; il y a Dramane Bagayogo qui est en Belgique, Souleymane Sangaré qui est en Europe. Ce sont des valeurs sûres au niveau des seniors. Il y a d’autres compatriotes notamment Coumba Niangadou, qui est aux Émirats Arabes Unis, elle qui est une valeur sûre du tennis malien expatrié.

Batourou Touré qui était l’une des meilleures de sa génération, l’espoir du tennis malien, a préféré abandonner le tennis pour la natation. Qu’est ce qui s’est réellement passé ?

Batourou Touré a fait son choix d’aller à la natation. À mon avis elle n’est pas allée parce qu’elle voulait être athlète de natation, elle est partie par plaisir, elle a dû trouver goût à celle-là, mais ce n’est pas un problème. Sinon après elle, d’autres joueuses ont percé. Pour moi, il y a aucune difficulté. Dans l’activité sportive, il faut être constant si vous ne l’êtes pas aux entraînements, dans la participation des compétitions forcément vous allez baisser de régime et être contre-performant, c’est normal. De surcroît quand vous ne menez pas de vie sportive cela va forcément jouer sur votre performance.

Récemment elle a participé au championnat national de tennis et d’autres compétitions au niveau national ici, pour nous elle demeure toujours joueuse de tennis. Maintenant le sport à ses règles si vous ne vous entraînez pas régulièrement, vous n’êtes pas dans des conditions physiques mentales, c’est compliqué et vous ne pouvez pas aller loin. Si vous participez aux compétitions nationales et internationales, vous n’allez pas faire de grands résultats, ça c’est important et si vous n’avez pas de soutien c’est aussi compliqué. Il faut avoir les moyens de participer aux compétitions internationales si la Fédération ne vous envoie pas car au niveau senior chacun se prend en charge s’il y a des prize money vous participez, si vous avez des soutiens, des sponsors vous participez dans le cas échéant les parents doivent vous aidez et si les parents ne s’intéressent pas à leurs enfants ça c’est autre chose. La Fédération, les clubs et les ligues qui se battent, ont leur lutte, je pense qu’à ce niveau il n’y a pas de problème. Le tennis malien n’a aucun problème avec les athlètes, ceux qui ont préféré se mettre en retrait c’est normal qu’ils ne puissent pas être parmi l’élite.

On dit que le tennis est un sport de riche, qu’en dites-vous ?

Quand on venait aux affaires, on nous a dit que le tennis est un sport de riches, un sport de bourgeois, ce n’est pas vrai. L’idée première qui a dominé, qui a fait croire aux gens s’explique. Vous savez chaque discipline sportive à ces pratiquants. On s’est rendu compte au début de l’introduction du tennis au Mali, les premiers pratiquants étaient des fonctionnaires, les colons, les premiers cadres donc quand vous avez vos pères, vos patrons dans un endroit, vous vous réservez de venir. C’est plus tard qu’on s’est rendu compte que c’est un sport comme les autres. Quand nous sommes arrivés à la tête de la Fédération à travers notre cher président Mohamed Oumar Traoré qui a finalement renoncé à se présenter pour 4ème ou 5ème fois en décembre 2021, il a cédé son fauteuil de président à son vice-président Amadou Togola, qui dirige aujourd’hui le tennis malien. Nous avons essayé de démontrer que le tennis n’est pas un sport de roi, c’est un sport comme tous les autres. Qu’est-ce que nous avons fait ? Premier constat: On s’est rendu compte que les matériels, les équipements étaient chers, deuxièmement ils n’étaient pas accessibles, on en trouvait pas partout et à l’époque les conditions économiques maliennes n’étaient pas aussi que ça. Les gens n’avaient pas autant de revenus. Troisième facteur, ce n’était pas une discipline connue. La discipline était sanctionnée par le fait qu’elle soit considérée comme un sport de roi, donc il fallait maintenant démontrer le contraire, il fallait démystifier la discipline et c’est ce que nous avons fait.

Quels sont les objectifs de la Fédération malienne de tennis ?

L’objectif à court terme, c’est de maintenir le cap des résultats déjà en cours et de faire en sorte que ces résultats soient maintenus et progressivement améliorés. à moyen terme, c’est de faire en sorte que les moyens puissent être mobilisés afin de financer notre plan de développement parce que si ces moyens n’y sont pas c’est compliqué. Nous tenons compte aussi de l’environnement économique national et international, qui est aujourd’hui fortement secoué et qui perturbe l’ensemble des entreprises nationales et même l’Etat, qui nous apporte beaucoup de ressources et aussi à travers notre sponsor avec lesquels nous avons développé plus de partenariats gagnants-gagnants, afin que les ressources à mettre à notre disposition soient plus conséquents. Pour trouver d’autres sponsors et financer les sportifs (…).

À long terme, nous voulons que les collectivités territoriales s’approprient le développement du tennis national parce que ce sont des acteurs importants qui mobilisent beaucoup de partenaires, de ressources mais généralement le sport est un peu négligé. Nous voulons inciter les collectivités à développer les terrains de tennis de niveau mondial et pourquoi pas développer aussi la terre battue parce qu’aujourd’hui, il faut compter sur ce type de tennis au niveau international. Travailler aussi sur la formation de l’élite dirigeante, les membres de la fédération les membres des ligues régionales, les membres des clubs de tennis, les entraîneurs, les arbitres et les sociétés sportives il faut qu’on arrive à inciter les gens à créer des sociétés sportives afin qu’elles puissent amener les matériels, former et encadrer les enfants de surcroît ces sociétés feront du profit.

Ce sont des visions que nous avons à travers notre président Amadou Togola, ainsi que le président d’honneur Mohamed Oumar Traoré bien qu’il soit un peu loin de la Fédération. Mais, il peut toujours nous apporter son expertise. Sans oublier de développer des partenariats avec les médias parce que sans les médias, on ne peut rien. Donc, nous avons trouvé les moyens nécessaires pour qu’ils puissent continuer de nous aider.

Par Dramane COULIBALY