Ibrahim Djambo : « On va payer le prix et les générations futures »

Sept joueurs maliens ont été radiés de l’équipe nationale masculine ainsi que de toutes activités liées à la pratique du basket-ball dans le pays. Ces derniers sont reprochés d’avoir incité leurs coéquipiers à ne pas disputer les rencontres comptant pour la troisième fenêtre des éliminatoires de la Coupe du monde 2023. Les basketteurs maliens réclament leurs primes depuis l’AFROCAN 2019 affirme Ibrahim Djambo, le capitaine de la sélection malienne. « Rien n’était prémédité, nous avons quitté Bamako en espérant entrer en possession de nos primes à Kigali », a-t-il indiqué.

Entretien.

La sélection malienne a été mise à l’écart des éliminatoires de la coupe du monde de basket-ball 2023 à la suite du refus des joueurs de descendre sur l’arène. Pourquoi avez-vous refusé de jouer vos matchs pourtant vous étiez déjà à Kigali ?

Nous ne devrions déjà pas être à Kigali, tout le monde le sait au Mali. Nous avons prévenu nos dirigeants que nous ne souhaitons pas y aller. Ils ont multiplié des réunions et ils envoyaient à chaque fois des personnes venir nous parler. Ils ont réussi à nous convaincre en nous rappelant que nous aurons toujours le droit de réclamer nos primes à Kigali. Nous sommes arrivés au Rwanda dans la nuit de mercredi à jeudi autour de 4 heures du matin. En début d’après-midi, nous avions une séance d’entrainement et nous étions dans l’attente d’une réaction. Aucune information sur la situation des primes, ils croyaient que nous allions jouer. Nous avons été complètement ignorés, ils ne plus réagissaient à nos appels. Quand on appelait, personne ne décrochait. Il ne s’agissait plus d’un problème de primes mais d’un manque de respect. Il y a un des nôtres qui est resté à Bamako à cause d’une blessure, nous l’avions désigné comme celui qui devait récupérer nos primes et nous les envoyer. Quand on lui demandait quelle était la situation à Bamako, il disait qu’on ne lui avait rien remis. Nous avons compris à ce moment que nous avons été pris au piège, raison pour laquelle nous avons décidé de ne pas jouer nos matchs.

Vous ne craignez pas les sanctions qui pouvaient suivre ?

Notre revendication consistait à apporter du changement. S’il y a des sanctions, pas de soucis, on va payer le prix et les générations futures vont en profiter. Nous n’avions aucune crainte sur ce qui allait arriver. Nous sommes fiers d’avoir décrié une injustice. Cela ne doit plus exister dans le basket-ball malien. Il était temps de mettre fin au manque de considération.

Pourquoi avez-vous accepté d’embarquer dans l’avion à destination de Kigali si vous saviez que n’allez pas jouer vos matchs ?

Rien n’était prémédité, nous avons quitté Bamako en espérant entrer en possession de nos primes à Kigali. La première chose que j’ai faite quand je suis arrivé au Rwanda, c’était de laver mes équipements car j’étais prêt à mouiller le maillot pour mon pays.

À quel moment vous avez pris la décision de boycotter les matchs ?

Il faut savoir que ce n’est pas la première fois que ce type d’incidents se produise au sein de l’équipe nationale du Mali. Les précédentes fois, nous avons souvent accepté de jouer malgré le fait que nous n’étions pas payés. Ils ont cru que le même scenario allait se reproduire : « Allez jouer, l’argent arrive ». Nous avons dit non, on ne joue pas si on ne perçoit pas nos primes.

Avez-vous pensé à vos chances de qualification pour le prochain tour de la compétition ?

Nous étions à une victoire de la qualification pour le second tour. Ce refus de jouer était le prix à payer pour le changement, malheureusement certaines personnes ne pourront pas nous comprendre. Il n’y a rien de plus important que de jouer une Coupe du monde. Nous étions si près d’une qualification et c’est dommage. Ce problème de primes ne touche pas uniquement de l’équipe nationale masculine senior, mais de toutes les autres catégories confondues. Il n’y a pas une discipline au Mali qui ramène les médailles comme le basket-ball, mais on n’a jamais eu rien en retour. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point les jeunes sont boycottés au Mali. Nos vice-champions du monde U19 n’ont jamais rien perçu ni être reçus par nos dirigeants.

Que vous a dit la Fédération malienne de basket-ball au sujet des primes ?

Ce n’était que des promesses. Ils ont continué à nous mener en bateau en pensant que la vérité n’allait pas éclater au grand jour. Jusque-là, il n’y a rien mais des sanctions sont tombées (Rires).

Êtes-vous au courant que la Fédération est tributaire du Ministère des Sports en ce qui concerne le budget ?

Nous savons très bien que la Fédération malienne de basket-ball est tributaire du Ministère des Sports. Notre mouvement ne concernait pas uniquement que le bureau fédéral, le Ministère était aussi pointé du doigt.

Que vous a dit le représentant du Ministère des Sports à Kigali quand vous êtes allés vers lui ?

Nous étions au Rwanda avec le représentant du Ministère des sports, mais il n’y avait aucun discours pour nous faire comprendre la situation. La seule fois qu’il est venu nous parler, nous avons compris qu’il n’y avait pas d’argent et que nous avons été manipulés. Il voulait continuer à nous traiter comme des enfants en dissimulant la vérité.

On parle de primes mais on ne sait pas exactement de combien on parle ?

Il y en a trop. Nous réclamons nos primes depuis l’AFROCAN 2019 à Bamako. Quand l’actuel ministre (Mossa Ag Attaher) est arrivé à son poste, il nous a clairement fait savoir qu’il ne s’occuperait pas des primes impayées avant son mandat. Nous avons fait notre travail mais quand il s’agit de nous reverser notre argent, on nous dit qu’on ne va pas tenir compte de ça.

Les dernières nouvelles disent que l’argent a été décaissé lundi. Êtes-vous au courant de cette information ?

Je ne suis au courant de rien, c’est d’ailleurs vous qui m’informez. Ils ne communiquent pas, ils ne nous disent rien.

Par Bogmis JOELLE, Rue2ponpon